La genèse de Diablo II: Anecdotes et développement d'un jeu légendaire

JudgeHype | 08/10/2015 à 18h30 - 20

USGamer a récemment publié un article extrêmement intéressant à propos de la genèse de Diablo II. Je vous en recommande fortement la lecture, tant vous y apprendrez des éléments sur cette époque lointaine, située entre 1997 et 2000.

Si l'anglais vous rebute, ce que je peux aisément comprendre, voici un condensé d'infos qui ont retenu mon attention et qui méritent un coup d'oeil de votre part ;)


Diablo
  • L'équipe derrière le 1er Diablo était au départ indépendante. Ce n'est qu'au milieu du projet que Blizzard a racheté la société pour créer Blizzard North. Ce fut une véritable bouffée d'oxygène pour les développeurs, qui n'avaient ainsi plus de contraintes budgétaires. C'est notamment Blizzard qui a ajouté le concept de Battle.net.
  • Au lancement de Diablo, l'équipe n'avait pas d'idées claires sur quel jeu faire par la suite. Mais avec le succès du premier épisode, il est très rapidement devenu évident qu'il fallait développer une suite, qui allait corriger de nombreux défauts de Diablo. Le succès fut bien au-delà de toutes les espérances.
  • La triche dans Diablo était un fléau. Mais il faut s'avoir qu'au départ, l'équipe a simplement pris Diablo et l'a mis sur Battle.net. Le mode multijoueur a été implanté seulement six mois avant la sortie en décembre 1996. Le jeu était peer-to-peer, pas client-serveur, ce qui sous-entendait que toutes les infos étaient situées sur l'ordinateur du joueur, ce qui rendait la triche aisée. La réflexion qui était alors que si quelqu'un voulait ruiner son expérience de jeu, tant pis pour lui. Mais avec internet, le hack a pris une énorme dimension et tout le monde, ou presque, s'est mis à tricher. L'équipe a donc eu envie de faire mieux sur Diablo II.
  • À la fin du développement de Diablo, l'équipe était composée de 14-15 personnes. Pour Diablo II, l'équipe finale tournait plutôt avec 45 employés. Ce n'est qu'au fil des mois que l'équipe s'est étoffée, passant d'une vingtaine à 45 employés à la sortie.

Diablo II : Un nouveau monde
  • Les six premiers mois du développement furent très particuliers. L'équipe passait beaucoup de temps à jouer à d'autres jeux ou à aller voir des films. Elle a perdu pas mal de temps de cette façon, mais cette perte de temps était "nécessaire" tant le rush final sur Diablo fût difficile. Il faut dire que c'était la première fois que les développeurs sortaient un jeu de cet acabit. Vers la mi-97, l'équipe a repris plus de rythme, mais elle avait vraiment besoin de faire une pause auparavant.
  • Ce démarrage plutôt lent était également nécessaire de part les nouvelles technologies utilisées sur Diablo II. Il faut du temps pour que les ingénieurs et programmeurs mettent les choses en place. Pendant les 6 mois qui ont suivi, l'équipe a pondu l'acte I, les régions environnantes et les premiers donjons.
  • L'équipe a beaucoup réfléchit avant d'annoncer le développement de Diablo II. Elle voulait faire monter la hype autour du jeu. Il ne fallait pas annoncer le jeu trop tôt, mais à côté de ça, Blizzard avait annoncé StarCraft avant même d'avoir réellement un jeu. Pour ce dernier, il s'agissait plus d'une couche placée sur le moteur de Warcraft. On l'a vu par la suite car le jeu a totalement changé. Au final, le jeu aura cependant été annoncé trop tôt quand même. Blizzard souhaitait néanmoins montrer que les devs écoutaient les joueurs qui se plaignaient de la triche dans Diablo, en montrant que sur D2, les choses allaient être différentes. Si dans la pratique ce ne fut pas réellement le cas, l'équipe voulait communiquer à ce sujet pour montrer qu'elle était à l'écoute des joueurs.
  • Parmi les idées qui n'ont jamais vu le jour, on note la "Battle.net Town". David Brevik souhaitait que le joueur entre dans un monde, sans plus jamais le quitter. Il souhaitait que le joueur entre dans un monde, pas dans une fenêtre de discussion. Battle.net Town vous permettait de vous balader, d'entrer dans un bar pour discuter avec d'autres joueurs, ou aller voir un marchand pour commercer, puis vous rendre auprès d'un PNJ spécifique pour voyager jusqu'à l'acte I. Bref, vous ne quittiez jamais l'univers de Diablo. C'était l'une des fonctionnalités les plus désirées des devs, mais elle n'a jamais vu le jour.
  • L'équipe jouait beaucoup à Ultima Online à l'époque, et voulait réaliser quelque chose de similaire avec Diablo II. Idéalement, vous auriez pu aller de la cathédrale des Soeurs de l'Oeil Aveugle au désert sans chargement. Mais Blizzard n'a pas réussi cette prouesse avant World of Warcraft.
  • L'un des plus grands défis de l'équipe était la réalisation des zones extérieures. Comment créer des obstacles, des frontières ? Il fallait créer des zones extérieures, mais en leur mettant des frontières pour éviter que les joueurs se baladent éternellement. C'est là que sont intervenus les murs bas, dont beaucoup de personnes se sont plaintes. Pourquoi ne peut-on pas enjamber ces petits murets ? Il fallait donc créer des limites naturelles que les joueurs accepteraient sans broncher.
  • Dans Diablo, le livre de quêtes était assez limité. Il fallait créer un nouveau Quest Log où on pouvait voir ce qui avait déjà été accompli, ce qui était relativement nouveau. Il fallait que les joueurs sachent que faire en lançant une partie. Livre de quêtes, waypoints... Tout cela était à inventer.
  • Il n'existait pas de "Design Document" définitif pour Diablo II. L'équipe avait généralement des idées et se disait : "ha oui, ça c'est trop cool, trouvons un moyen d'ajouter cela au jeu". Créer une jungle, y placer des grenouilles tueuses, etc. Régulièrement, de nouvelles idées venaient se greffer à Diablo II. Côté planning, les devs planifiaient le mois à venir, voire la semaine suivante seulement. "Ha, on a besoin de plus de monstres dans cette zone, on s'y met". Tout était fait pour améliorer le jeu. Tel élément n'est pas amusant ? Alors améliorons-le tout de suite. Avec un Design Document, peut-être aurait-il fallu bosser sur des choses pas amusantes pendant de longs moments, mais ce ne fut pas le cas sur Diablo II. À l'inverse, gérer une équipe de cette façon n'avait rien de facile...

La naissance de l'arbre de talents et des classes de Diablo II
  • Lorsqu'il a fallu déterminer les aptitudes des classes, Blizzard avait plusieurs choix. Elles pouvaient partager les aptitudes, comme dans le premier épisode, mais cela pouvait être totalement différent. L'idée des arbres de talents est venue un peu par hasard. Au départ, c'était un peu le foutoir avec les dizaines d'aptitudes imaginées par l'équipe. Comment les agencer de manière à ce que les joueurs puissent aisément les identifier ?
  • Dans le premier Diablo, les joueurs pouvaient imaginer tous les builds qu'ils voulaient. Mais d'un point de vue plus généraliste, beaucoup de fans étaient submergés par les possibilités offertes. Il fallait donc donner une certaine flexibilité, mais pas trop quand même.
  • Du côté des apparences des classes, le paladin fut vraiment réussi dès le début, l'équipe sachant parfaitement où elle voulait aller. Idem avec le barbare. Pour le nécromancien, il s'agissait d'un personnage bizarre et personne ne savait vraiment à quoi le faire ressembler. L'équipe s'en moquait parfois, car il donnait l'impression de porter une jupe. L'amazone ne semble pas avoir posé trop de souci. Quant à la sorcière, l'équipe a fait de nombreux aller-retour avant d'en déterminer le look final.

1998 et 1999 : La descente aux enfers de Blizzard North
  • À cette époque, Blizzard North était un groupe de personnes un peu séparé du reste de la société. La relation avec Blizzard South était tendue. Les devs avaient une sorte d'indépendance mais devaient tout de même rapporter à leurs collègues l'état du développement de Diablo II. Pas mal de disputes ont éclaté entre les protagonistes selon Erich Schaefer.
  • Un jour, un producteur est venu pour aider l'équipe. Cependant, cela s'est très mal passé et Blizzard North a signalé qu'il le fallait plus envoyer personne pour leur dire ce qu'ils devaient faire. C'est à ce moment-là que Bill Roper est entré en scène. Il est arrivé chez Blizzard North et le courant est bien passé dès le départ. Il était très enthousiaste à l'idée de bosser avec eux et adorait le jeu.
  • Parmi les points discutés avec Blizzard South, on trouvait le mode Hardcore. Ils pensaient que les joueurs en voudraient à Blizzard pour la mort de leurs personnages, et qu'ils en finiraient par haïr Diablo et Blizzard. Heureusement, le mode Hardcore a finalement fait partie du jeu final. Notez que Blizzard South a tout de même pas mal bossé sur Diablo II, notamment au niveau du Lore et des cinématiques.
  • C'est aussi Blizzard South qui s'est occupé de l'histoire, en grande partie. Pour montrer à quel point les relations étaient étranges, on peut raconter l'histoire de la cinématique de fin de Diablo. Un mois avant la sortie du jeu, la cinématique fut montrée à Blizzard North. Personne ne savait que le héros du jeu allait se planter la pierre d'âme dans le front et mourir. Chez Blizzard North, les devs furent choqués car personne n'avait été consulté en ce sens. Néanmoins, c'était tellement bizarre comme fin de jeu, que l'équipe l'a tout de même appréciée. Et puis de toute façon, il était trop tard pour changer quoique ce soit...
  • Autre élément étrange de la relation entre Blizzard North et Blizzard South : la distribution des revenus. Blizzard South recevait des royalties des ventes de Diablo, et Blizzard North n'était pas toujours d'accord avec le principe. Mais par la suite, ils ont vu qu'ils recevaient de l'argent de StarCraft, parfois sans réellement savoir comment distribuer l'argent entre les employés.

Le Big Crunch
  • Vers le mois de juin 1999, l'équipe a commencé à bosser pratiquement non-stop, 7 jours sur 7, revenant à la maison vers minuit pour repartir au boulot 8h00. L'objectif était de sortir le jeu d'ici la fin de l'année. Cependant, sans deadline, sans rien pour gérer le temps correctement ni les tâches de chacun, c'était très compliqué. David Brevik a par exemple pris 4 jours de congé en 1999, travaillant tous les autres jours de l'année, 14h par jour.
  • Un jour, Mike Morhaime a appelé, vers le mois d'octobre. Il a expliqué que Blizzard North n'aurait pas terminé le jeu cette année et qu'il allait être postposé à l'année suivante. David Brevik n'y croyait pas et pensait qu'il pouvait terminer le jeu. En réalité, il ne voulait pas y croire, alors que quelqu'un qui avait une vue extérieure voyait clairement que le jeu était loin d'être terminé. Mike a donné plusieurs mois supplémentaires pour finir le jeu : "Trois mois, quatre mois, six mois, peu importe.".
  • Pour donner une idée du retard, il faut se rendre compte que fin 1999, l'Enfer n'existait même pas.

Lancement de Diablo II
  • Blizzard s'est rapidement rendu compte que le succès allait être au rendez-vous, notamment car le jour du lancement, Battle.net était très difficilement accessible. Il a fallu corriger pas mal de choses en urgence.
  • La triche a immédiatement posé des soucis, et l'équipe a tout fait pour corriger les bugs et exploits.
  • La Pierre de Jordanie avait été conçue comme un objet extrêmement rare et puissant. Lorsque les joueurs ont commencé à la dupliquer, elle est devenue une monnaie dans Diablo II. On en trouvait des tonnes. Blizzard a dès lors cherché des solutions, comme le fait de vendre des Pierres de Jordanie pour invoquer un super Diablo.
  • Diablo II a reçu beaucoup de critiques, notamment car certains pensaient qu'il rendait le genre RPG trop typé arcade. La triche a également apporté beaucoup d'avis négatifs. Même certains professionnels se moquaient du jeu lors de la GDC, alors que pour David Brevik, il fallait d'abord faire un jeu fun, puis s'occuper de la triche.

Diablo II: Lord of Destruction et patch 1.10
  • Les gens de Blizzard North savaient qu'ils allaient développer une extension. Cependant, après la sortie et la nécessité de stabiliser le jeu, ils avaient besoin de faire une pause. Pas mal de monde était en burn out. Mais dès le milieu de l'été, le travail a commencé sur Lord of Destruction. L'expérience Hellfire pour Diablo n'avait pas été concluante et cette fois, ils voulaient développer l'extension en interne.
  • L'extension a vraiment permis à Diablo II d'exploser. Le jeu n'avait pas toujours eu de bonnes critiques jusque-là. Mais les fonctionnalités apportées, comme les mots runiques, lui ont permis de prendre une toute autre dimension.
  • Le suivi du jeu a également beaucoup plus aux joueurs. Le patch 1.10 apportait par exemple les synergies. Le jeu était devenu très différent de ce qu'il était à l'origine.
Intéressant vous ne trouvez pas ?



20 commentaires - [Poster un commentaire]


Chargement des commentaires...

Poster un commentaire

Vous devez vous identifier pour poster un commentaire.
Nombre de visites sur l'accueil depuis la création du site Diablo II : 43.013.846 visites.
© Copyright 1998-2024 JudgeHype SRL. Reproduction totale ou partielle interdite sans l'autorisation de l'auteur. Politique de confidentialité.